A la fin de notre paracha la Torah nous apprend que : « Haran (le frère d’Abraham) mourut en présence de Téra’h son père, dans son pays natal, à Our Kasdim. » (Beréchit XI, 28). En présence (Al Péné) de son père signifie du vivant de son père.
Rachi rapporte une autre explication, au nom du Midrach, que c’est à cause de son père qu’il mourut.0 Téra’h ayant dénoncé à Nimrod son fils Abraham, pour avoir brisé ses idoles, Nimrod jeta alors Abraham dans une fournaise. Haran était assis et s’était dit : « Si Abraham sort vainqueur, je serai de son côté, et si c’est Nimrod qui aura le dessus, je serai du côté de Nimrod. Lorsqu’Abraham fut sauvé on demanda à Haran : « Avec qui es tu ? » Il répondit : « Avec Abraham ! » On le jeta, à son tour, dans la fournaise et il fut brûlé vif (Midrach Rabba 38, 13). C’est de là que vient le nom de « Our Kasdim » : le feu des Chaldéens.
Les commentateurs, tout d’abord, s’étonnent que Haran ne fut pas sauvé comme Abraham. Il sacrifia, lui aussi, sa vie pour l’Eternel et pourtant … il brûla. Il ne semble pas non plus qu’il ait été retenu comme l’exemple de quelqu’un qui ait donné sa vie pour sanctifier le Nom Divin. Au contraire, il ressort du Midrach un reproche à sa conduite. Marquant au départ un temps d’hésitation, il ne fut pas du niveau d’Abraham ; cependant il se rangea finalement dans le camp de son frère.
Les miracles sont pour nous une manière de renforcer notre Emouna, et c’est aussi leur but, comme à la sortie d’Egypte, ou encore lors de la traversée du désert. Abraham est nommé l’Hebreu (Haivri du mot Ever : de l’autre côté), parce que le monde entier était d’un côté et ne reconnaissait pas D…, alors qu’Abraham était, lui, de l’autre côté. Après l’épisode de Our Kasdim, on ne voit pas non plus qui aurait rejoint le camp d’Abraham, à l’exception de Haran. Il devrait être considéré, de ce fait, comme un Tsadik !
Le Rebbe de Kosk, zatsal, donne une réponse simple : « Abraham est entré dans la fournaise, en l’honneur de D… ; il pensait périr brûlé : il fut sauvé ; Haran entra en pensant être sauvé : il fut brûlé. »
Le Rav Chalom Chvadron, zatsal, propose une autre réponse. En fait Haran forme un troisième groupe, différent de celui d’Abraham et de celui de Nimrod. Haran aurait simplement décidé de ne pas prendre position, et d’attendre pour se joindre au vainqueur, sans s’impliquer dans ses motivations, afin de profiter aujourd’hui de l’un et peut- être de l’autre demain.
Le Midrach explicite un peu plus : Haran se serait dit : « Si Abraham sort vainqueur, je dirai que je suis avec lui ! Si c’est Nimrod, je dirai que je suis avec lui ! » Il n’est pas franchement convaincu qu’Abraham ait raison. « Je dirai », par intérêt, profitant de l’opportunité du moment, pour tirer bénéfice de sa proximité avec l’un ou avec l’autre. C’est pourquoi il ne fut pas sauvé.
Le Sfat Emeth (Lekh Lékha 637) nous fait remarquer que de Haran, descendent les matriarches (Sarah, Rivka, Ra’hel et Léa) et que de son fils Loth descendent le roi David et le Mashia’h. Par quel mérite ? C’est que, répond le Rav, quand bien même ses intentions n’étaient pas des meilleures, il y eut quand même un grand Kidouch Hachem, une sanctification du Nom de D… On peut rapporter ici le Targoum de Yonathan Ben Ouziel qui écrit que les gens disaient que c’était grâce à son frère Haran, bien connu pour ses dons de sorcellerie, qu’Abraham s’était sorti de la fournaise. Aussi, lorsqu’Haran fut jeté à son tour et qu’il pérît, ils comprirent alors que c’était uniquement le mérite d’Abraham qui justifia l’intervention du D… d’Abraham.
Chabbat Chalom Oumévorakh