Parachat BALAK
La michna dans Pirké Avot (Ch 5 michna 19 ) nous enseigne : « Celui qui possède les trois caractéristiques suivantes compte parmi les disciples d’Abraham, notre père, et celui qui possède les trois caractéristiques opposées compte parmi les disciples de Bilaam, l’impie. Les disciples d’Abraham, notre père, possèdent un œil bienveillant, un esprit humble et une âme modeste. Les disciples de Bilaam, l’impie, possèdent un œil envieux, un esprit hautain et une âme avide ».
La michna poursuit : « Quelle est la différence entre les disciples d’Abraham, notre père, et ceux de Bilaam l’impie ? Les disciples d’Abraham, notre père, jouissent (du fruit) de leurs bonnes actions dans ce monde-ci et héritent du Monde Futur, car il est écrit : Il y a de quoi faire hériter ceux qui M’aiment, et leurs réserves, Je les remplirai(Michlé XIII,21).. Quant aux disciples de Bilaam l’impie, ils héritent du Guehinom, et descendent dans la fosse de l’anéantissement, comme il est dit : Et Toi, D…, Tu les fais descendre dans la fosse de l’anéantissement (ces) hommes de sang et de perfidie ; ils ne vivront pas la moitié de leurs jours ; quant à moi, j’espère en Toi » (Téhilim LV,24).
Il est surprenant de comparer Bilaam à Abraham comme s’ils étaient, potentiellement, du même niveau spirituel, et de confronter leurs élèves, comme si leurs conduites étaient comparables.
Le Gaon de Vilna (Adereth Eliyaou, Balak 24,30) rapporte que Bilaam, comme Abraham, a connu dix épreuves. Toutefois, si les épreuves d’Abraham avaient pour but de le détourner de la Volonté divine, et qu’il les surmonta, avec abnégation, restant toujours fidèle à D…, celles de Bilaam avait pour but, elles, de le ramener à D…, pour lui faire accomplir Sa volonté. Mais Bilaam n’en surmonta aucune, bien au contraire, il se détourna sans cesse de la voie de l’Eternel. Nous voyons bien, là aussi, que nos Sages cherchent à les comparer, dans leur conduite et leurs qualités, l’un à l’autre.
C’est que Bilaam aurait pu atteindre des niveaux spirituels très élevés, lui qui s’écria : « parole de Bilaam… de celui qui entend le verbe divin, qui perçoit la vision du Tout-Puissant » (Bamidbar XXIV, 3-4). Ou encore « puissé-je mourir comme meurt ces justes, et puisse ma fin ressembler à la leur » (id XXIII, 10). Il espérait donc même mourir comme les patriarches qui sont appelés les Justes. Nos maitres relèvent : « (S’) il n’a plus paru en Israël un prophète tel que Moché » (Dévarim XXXIV, 10), en Israël, en effet, il ne s’en est pas levé, mais parmi les nations du monde, oui, il y a eu Bilaam ! (Sifri).
Le rav Yéhezkel Sarna zatsal nous explique que nos Sages ont tenu à souligner, dans cette michna, les raisons pour lesquelles Abraham fut si grand, Bilaam si méprisable, et tombé si bas, qu’il aura perdu toute spiritualité. Rabbénou Yona précise que c’est uniquement, au travers de ces trois caractéristiques, que l’on devient l’élève d’Abraham ou à l’inverse, celui de Bilaam, car elles regroupent en elles, toutes les bonnes conduites, et a contrario les mauvaises.
Le Rav Haïm Vital zatsal nous rappelle que la Torah ne nous parle pas des bonnes (midoth) vertus, ni des mauvaises, car elles sont préalables à la Torah : « derekh eretz kadma latorah », les bonnes vertus, « le savoir-vivre », précèdent la Torah. L’essentiel de ce que l’homme construit, par l’Etude et l’accomplissement des mitsvot, repose principalement sur ces fondations, que sont les bonnes qualités, les midoth.
On remarquera que le verset de Téhilim, cité dans la michna, au sujet des élèves de Bilaam, a été dit par le roi David sur Doég et A’hitofel, « hommes de sang et de perfidie ». Pourtant, tous deux étaient de grands érudits en Torah, mais ils n’ont pas droit au monde futur (Sanhedrin). Leur étude et leurs bonnes actions n’auraient-elles pas pu leur épargner un tel châtiment ? C’est qu’ils avaient entretenu les mauvaises midoth de Bilaam.
Chabbat Chalom Oumévorakh