DEVARIM
Dans notre paracha, Moché rappelle la réaction apeurée du peuple au discours alarmiste des explorateurs. « Je vous ai dit : Ne tremblez pas (…) L’Eternel votre D… qui marche devant vous lui-même combattra pour vous, comme Il l’a fait contre l’Egypte sous vos yeux, et dans ce désert où tu as vu l’Eternel ton D… te porter comme un père porte son fils (…) Mais en ceci, vous n’avez point eu confiance en l’Eternel votre D… ! » (Dévarim I, 29-32).
Il fut alors décrété que toute cette génération n’entrerait pas en terre d’Israël, et pour avoir pleuré toute la nuit pour rien, cette nuit est devenue, tous les 9 Av, une nuit de pleurs pour la destruction du Beth Hamikdach.
Comment justifier une telle peur ? D’autant que l’Eternel avait dit : « Je te ferai précéder par le frelon qui chassera le ‘Hivi, le Canaanën et le ‘Hiti de devant toi » (Chémot XXIII, 28). Ce frelon qui frappait à l’œil ces ennemis et leur injectait un venin mortel, (Sota 36a).
Le rav Yaakov Galinski zatsal répond en rapportant un passage concernant le prophète Elicha. A chaque fois que le roi d’Aram projetait de tendre une embuscade au roi d’Israël, Elicha envoyait un message le prévenant de ne pas passer à tel endroit. Le roi d’Aram, profondément troublé, pensait qu’il y avait un traitre parmi ses officiers, mais on l’informa que ceci était dû à la prophétie d’Elicha. Il envoya aussitôt une forte armée pour le capturer.
Lorsque le serviteur d’Elicha aperçut les nombreux chevaux et les chars, il fut terrifié. Elicha le rassura : « N’aie crainte, nos troupes sont plus nombreuses que les leurs. Il fit alors cette prière : Eternel daigne ouvrir les yeux de mon serviteur afin qu’il voie ! (…) il aperçut la montagne couverte de chevaux et de chars de feu tout autour d’Elicha. » (Mélakhim 2, VI, 17).
Lorsque les ennemis s’approchèrent, le prophète pria pour qu’ils soient frappés de cécité. Il les mena ensuite à Shomron (où ils retrouvèrent la vue) devant le roi d’Israël qui demanda s’il fallait les tuer. Elicha conseilla plutôt de leur offrir un repas copieux et de les renvoyer ensuite au roi d’Aram. « Les unités d’Aram renoncèrent alors à leurs incursions dans le pays d’Israël ».
Pourquoi donc Elicha a-t-il montré à son serviteur les chevaux et les chars de feu s’il ne s’en est pas servi ? C’est répond le Rav, parce que le serviteur était effrayé, et que la peur est contagieuse, Elicha aurait pu également éprouver de l’appréhension. Or la prophétie ne se manifeste qu’à travers la joie (Chabbat 30b). C’est pourquoi il tranquillisa d’abord son serviteur, lui montrant cette armée de feu. D’ailleurs, lorsque les enfants d’Israël partaient en guerre, il était rappelé : « Quel est l’homme peureux et au cœur lâche ? Qu’il se retire et retourne chez lui pour que le cœur de ses frères ne défaille point comme le sien » (Dévarim XX, 8).
A l’écoute des explorateurs, le peuple s’effraya : « Il est puissant le peuple qui habite ce pays » (Bamidbar XIII, 28). « Il est plus grand et plus fort que nous » (Devarim I, 28). Dans de telles circonstances, les paroles de Moché furent sans effet. La michna (Avot ch 4, 18) dit : « ne vient pas pacifier ton prochain au moment de sa colère, ne le console pas quand son mort est devant lui ». On pourrait aussi rajouter : « ne cherche pas à le raisonner dans un moment de peur ».
Les enfants d’Israël après le don de la Torah, avaient atteint un niveau spirituel très élevé, celui d’Adam Harichon avant la faute ! L’ange de la mort (le Satan) n’avait plus de prise sur eux. « J’avais dit, moi, vous êtes des dieux ; tous, des fils du Très-Haut », mais après la faute du veau d’or « non, vous mourrez comme des hommes … » (Téhilim LXXXII, 6-7).
Mais s’ils n’avaient plus de mauvais penchant, comment ont-ils pu commettre le veau d’or ? C’est que le Satan leur montra une image de Moché, sur son lit de mort, porté dans le firmament céleste (Rachi Chémot XXXII, 1). Les enfants d’Israël effrayés, complètement désemparés, n’étaient alors plus maîtres d’eux-mêmes.
Chabbat Chalom Oumévorakh