Parachat BO

Parachat BO

            A la fin de notre paracha, la mitsva des téfilines est mentionnée à deux reprises. Dans le paragraphe Kadech li kol bekhor comme il est dit : «  Et ce sera pour toi en signe sur ton bras et en rappel entre tes yeux, afin que la doctrine du Seigneur reste dans ta bouche : c’est d’un bras puissant que l’Eternel t’a fait sortir d’Egypte » (Chémot XIII, 9) ; puis  dans celui de Véhaya ki yébiakha : « Et ce sera comme  signe sur ton bras et comme fronteau entre tes yeux, car d’une main puissante l’Eternel nous a fait sortir d’Egypte » (Chémot XIII, 16).

Au Deutéronome, la Torah nous rappellera encore les téfilines, dans le paragraphe du Chéma Ysraël (Dévarim VI, 8) et dans celui de Véhaya im chamoa (Id. XI, 18). Ce sont ces quatre passages que l’on écrit et que l’on place dans les boîtiers des téfilines.

D’après la Kabbala, chaque paragraphe (paracha) correspond à une des quatre lettres du Tétragramme : Kadech à la lettre « Youd », Véhaya ki yébiakha au «  », Chéma Ysraël au « Vav » et Véhaya im chamoa au dernier «  ». C’est  dans cet ordre que ces parachiot doivent être écrites et placées dans les quatre compartiments (du boîtier de la tête), selon Rachi. Son petit-fils Rabbénou Tam, lui, est d’avis que la parachat Chéma doit être placée dans le dernier compartiment. Quoi qu’il en soit, cette parachat Chéma, correspond à la lettre «Vav», aussi pour Rabbénou Tam, et doit être écrite avant la paracha de Vahaya im chamoa. C’est donc, seulement une fois placées, que nous trouverons « comme écrit » Youd Hé Hé et Vav.

Le Rav Chimchon Pinkous zatsal nous explique l’enseignement allusif des téfilines selon Rabbénou Tam. Toute construction est précédée du Plan de l’architecte : la construction se fait, normalement, d’après le plan. La troisième lettre du Nom Divin, la lettre «Vav», représente les six Midots (Générosité ; Rigueur ; Magnificence-plénitude ; Victoire-gloire ; Splendeur-constance ; Fondement). Elle correspond au Plan de construction. La quatrième, la lettre «Hé» répond, elle, à la Construction (Zohar tome 3 page 257). Les téfilines de Rabbénou Tam posent ainsi le «Hé» avant le «Vav», autrement dit la Construction avant le Plan !

La vie est une longue démarche qui permettra à l’homme de se Construire, en suivant différentes étapes du Plan, au terme desquelles il sera prêt à donner, par exemple, jusque sa vie pour son Créateur. Est-il possible de brûler toutes ces étapes?

Arrivés aux portes du Temple, les romains n’osèrent pas y entrer, par crainte de la sainteté du lieu. Ils proposèrent qu’un juif pénètre le premier, qui pourra prendre possession de l’objet qu’il voudra. Volontaire, Yossef Méchita, un juif renégat, entra et ressortit avec la Ménora. Les romains décidèrent que l’objet ne convenait pas à un simple homme et lui proposèrent d’aller prendre autre chose. Ce qu’il refusa. Ils lui promirent une exemption d’impôt pour trois ans, sans succès. « J’ai déjà mis une fois mon D… en colère, vais-je recommencer ? ». Ils le torturèrent, en vain. « Malheur à moi qui ai mis en colère mon Créateur ! » (Midrach Béréchit Rabba ch 65, 18). Il est dit à son propos « Yits’hak aspira l’odeur de ses vêtements (bégadav) » (Béréchit XXVII, 27). Ne lit pas « bégadav », ses vêtements, mais « bogdav », ses rebelles.  Même ceux qui ne sont pas d’une loyauté totale répandent une odeur agréable, grâce aux mitsvot qu’ils observent (Sanhedrin 37a).

Yossef Méchita, le renégat, rebelle à la Torah et aux Mitsvot, a gagné en un instant sa Construction, sans être passé par le Plan de préparation.

C’est ce que les téfilines de Rabénou Tam, appelés aussi les téfilines « du monde futur », nous apprennent. Dans ces temps qui précèdent la venue du Machia’h, nous voyons beaucoup de juifs franchir d’un bond toutes les étapes et arriver en haut de l’édifice duquel se dévoile la grandeur de leur âme. C’est qu’en cette période d’obscurité, il n’est pas toujours possible de marcher pas à pas, et il faut parfois, commencer à l’envers pour revenir ensuite consolider sa Construction.

Chabbat Chalom Oumévorakh