Parachat Béchala’h
Poursuivis par les égyptiens, les enfants d’Israël, arrêtés face à la mer rouge, se tournèrent vers Moché, qui se mit à prier. L’Eternel lui dit : « Pourquoi m’implores-tu ? Parle aux enfants d’Israël, qu’ils avancent » et ils « entreront au milieu de la mer à pied sec. » (Chémot XIV, 15-16).
Rachi rapporte que l’Eternel avait dit à Moché : « Ce n’est pas le moment de prier maintenant qu’Israël est dans la détresse » (Mékhilta). Mais n’était-ce pas justement le moment propice de prier ? Que devait-il faire d’autre ?
A propos du sacrifice de Pessah, qui a précédé la sortie d’Egypte, l’Eternel avait dit : « Le sang sera pour vous un signe sur les maisons que vous habitez, et Je reconnaîtrai le sang et Je passerai par-dessus vous, et il n’y aura pas contre vous de destruction lorsque Je sévirai sur le pays d’Egypte. » (Chémot XII, 13).
Pourtant : « Tout est dévoilé devant Lui ! » L’Eternel sait exactement qui habite telle maison, s’il est hébreu ou égyptien, s’étonne Rachi. Il répond que l’Eternel leur a dit : « Je saurai, en voyant le sang, que vous êtes occupés à la pratique de Mes mitsvot, et Je passerai alors au-dessus de vos maisons. »
Toutefois la question persiste, nous fait remarquer le rav Réouven Karlenchtein zatsal, l’Eternel sait bien qui a fait le sacrifice de Pessah. Dès lors quel besoin de ce sang sur les portes des maisons ? C’est que les enfants d’Israël avaient pratiqué l’idolâtrie en Egypte ; il leur fallait être prêts à faire don de leur vie (une Méssirout nefech), pour se faire pardonner.
Rav Papa demanda à Abayé (Bérakhot 20a) : « Pourquoi les anciens ont-ils eu droit à des miracles alors que nous-mêmes, nous pouvons crier et nous lamenter, et on ne nous prête aucune attention ? Abayé lui répondit que les premiers étaient prêts à sacrifier leur vie pour la sanctification du Nom divin, mais nous, nous ne sommes pas à ce niveau ! » Le rav Chmouel Rozovski zatsal, roch Yéchiva de Ponievitz, expliquait que de par sa nature un homme fait attention à sa personne et cherche à se protéger. Mais s’il se dépasse jusqu’à faire don de sa vie pour l’Eternel, en retour, l’Eternel lui fera un miracle au-delà des lois naturelles de ce monde.
Après la quatrième plaie, celle des bêtes sauvages, le Pharaon accepta que les enfants d’Israël fassent leurs sacrifices, à condition que ce soit en Egypte. Moché lui répondit : « Qu’il ne convient pas d’agir ainsi (…) or nous immolerons le dieu des Égyptiens, sous leurs yeux et ils ne nous lapideraient point ! » (Chémot VIII, 22-24).
Et pourtant, pour le sacrifice de Péssah, l’Eternel demanda de prendre un agneau et de l’attacher aux pieds du lit, quatre jours avant de l’égorger. Pendant ces jours les agneaux allaient, bien évidemment, attirer l’attention des Égyptiens, qui risquaient fort de s’en prendre aux enfants d’Israël. Plus encore, le sacrifice devant être « grillé, rôti au feu, la tête avec les jarrets et les entrailles » et non pas découpé en morceaux, tout égyptien de passage, à l’odeur du rôti n’aurait eu aucun doute quant au sort réservé à son dieu. Il fallait une vraie méssirout néfech des enfants d’Israël pour accomplir cette mitsva à la lettre.
Israël face à la mer, l’ange protecteur de l’Egypte, s’adressa à l’Eternel pour protester : « Ceux-là (les bné Israël) comme ceux-là (les égyptiens) pratiquaient l’idolâtrie ! » Le seul moyen de faire taire cette accusation était de se jeter dans la mer au risque de perdre la vie en se noyant ! C’est ce que l’Eternel dit à Moché : « Maintenant ce n’est pas le moment de prier ; que les enfants d’Israël se jettent à la mer et lorsque l’eau arrivera à leur bouche, tu lèveras ton bâton et la mer s’ouvrira. » Par ce dévouement, ce don de soi, ils mériteront d’être sauvés, la mer s’ouvrira pour eux et les laissera passer à pied sec.
Chabbat Chalom Oumévorakh