Parachat Ki Tissa
Après la faute du veau d’or, « Moché retourna vers le Seigneur et dit : Hélas! Ce peuple est coupable d’un grand péché. Ils se sont fait un dieu d’or; et pourtant si Tu voulais pardonner à leur faute! … Sinon efface-moi du livre que tu as écrit (…) L’Eternel répondit à Moché : celui qui a prévariqué envers moi c’est lui que j’effacerai de mon livre « (Chémot XXXII, 31-33).
Le Ramban explique que Moché proposa d’abord à D… de pardonner aux enfants d’Israël, de par Sa grande miséricorde. Autrement Moché se propose de porter, lui même, seul toute la faute du peuple et d’en être châtié à sa place, comme il est rappelé dans le verset : » et c’est pour nos péchés qu’il a été meurtri, par nos iniquités qu’il a été écrasé; le châtiment gage de notre salut, pesait sur lui, et c’est sa blessure qui nous a valu la guérison. » (Yéchaya LIII,5).
Moché Rabbénou, depuis l’Egypte, agissait avec empathie vis-à-vis des enfants d’Israël, et c’est ce qui l’a amené à prier pour leur salut, au péril même de sa vie. L’Eternel accepta sa demande comme il est dit : « Et maintenant va, conduis ce peuple où je t’ai dit ». En quoi la réponse de l’Eternel que « celui qui a prévariqué envers moi c’est lui que j’effacerai de mon livre » convient-elle à la demande de Moché ? Qui est (ou qui sont) le prévaricateur? Cela reste à expliciter.
Le rav Desler zatsal (Mikhtav Mé Eliyahou tome I, 149) explique que justement, cette qualité d’empathie qu’avait Moché envers ses frères leur donna « le droit d’existence » et la protection qui leur valurent de ne pas être exterminés. En Egypte Moché avait dit aux enfants d’Israël : « j’aurai préférer mourir à votre place » (Midrach Rabba I,27), parce que pour lui la vie, sans le peuple d’Israël, n’en était pas une. Après la faute du veau d’or, le sentiment qu’il ressent, est que si le peuple est exterminé, il n’a plus de raison de vivre. C’est pourquoi il préférerait disparaitre avec le peuple plutôt que de lui survivre. C’est ce qu’il demande lorsqu’il déclare : « efface-moi de Ton livre ». Pour sauvegarder Moché, l’Eternel consent à conserver le peuple tout entier !
A ce degré d’empathie et d’attachement au peuple, le ‘Hessed de Moché est une sanctification du Nom Divin qui vient réparer la profanation de Son Nom que constitue la faute du veau d’or. Et c’est par ce mérite que D… pardonnera aux enfants d’Israël.
On retrouve dans certaines circonstances la même idée. Par exemple, lorsque Rabbi Pinhas Ben Yair (Houlin 7a) en route pour accomplir la mitsva de racheter des captifs, demande au fleuve qu’il devait traverser de s’ouvrir devant lui, par le mérite de la mitsva qu’il allait accomplir. Le fleuve s’exécuta, après quoi, Rabbi Pinhas renouvela sa demande au fleuve, pour cette fois, permettre à un voyageur arabe de passer derrière lui. Ce voyageur, il l’avait rencontré en chemin, et il ne voulait pas qu’il dise qu’il avait été abandonné par le rabbin juif. Le miracle se reproduit et à nouveau le fleuve se divisa en deux, afin que ce voyageur puisse le rejoindre. L’arabe resté de l’autre coté, sur la rive eut été une profanation du Nom divin, et c’est pour cela que le fleuve s’ouvrit devant lui, bien qu’il ne méritait pas du tout un tel miracle. Il était cependant un élément de la sanctification du Nom de D…
Nossé béol im havero (partager le fardeau de son camarade ) fait partie des quarante huit qualités requises pour acquérir la Torah (Avoth Ch 6), parce que cette qualité nous permet de faire partie du klal ( de l’ensemble) et que la Torah a été donnée à la Nation et non aux individus, à la collectivité et non aux particuliers. Comme l’explique le Maharal (derekh ha’hyim), c’est la raison pour laquelle la Torah a été donnée à Moché et non aux Patriarches.
Par cette qualité d’abnégation, sa capacité de s’annuler face au plus grand nombre, Moché méritait d’être choisi pour recevoir la Torah et la transmettre aux enfants d’Israël. Aussi les aura-t-il sauvés de la mort après la faute, si grave, du veau d’or, en ayant demandé : »sinon efface-moi du livre que Tu as écrit ».
Chabbat Chalom Oumévorakh