Parachat Dévarim

Parachat Dévarim 

« En deçà du Jourdain, au pays de Moav, Moché commença à expliquer cette loi… » (Dévarim I, 5). Rachi rapporte, d’après le Midrach Tan’houma 2, que Moché expliqua la Torah en soixante-dix langues. Dans quel intérêt ? Pourquoi ces traductions et cela juste avant l’entrée en terre d’Israël ?   

            Le Ktav Sofer explique que c’est pour exclure l’opinion de ceux qui penseraient que la Torah n’a été donnée que pour être accomplie dans le désert, un lieu isolé du reste du monde, et où s’applique le verset : « Ce peuple il vit solitaire, il ne se confondra point avec les nations.» (Bamidbar XXIII, 10). Une fois en terre d’Israël, dans la situation nouvelle de nation, installée parmi d’autres, ce peuple devrait-il « adapter » la Torah, selon l’environnement du moment ? Voilà pourquoi la Torah fut traduite en soixante-dix langues, pour affirmer qu’elle doit être gardée, intacte, quelles que soient les circonstances, même en exil.          

Dans parachat Vaét’hanan il est dit : « Observez-les et pratiquez-les ! Ce sera là votre sagesse et votre intelligence aux yeux des peuples, car lorsqu’ils auront connaissance de toutes ces lois ils diront : elle ne peut être que sage et intelligente cette nation ! » (Dévarim IV, 6). Selon le Rav Yonathan Eybéchitz, zatsal, ce verset vient ici détromper ceux qui s’imaginent qu’aux yeux des nations, la Torah serait source de mépris ou de moquerie. Bien au contraire, nous voyons plutôt les non-juifs mépriser ceux qui ont abandonné la pratique religieuse et qui cherchent à s’assimiler.                                                                                                                                                                                        

Avant de donner l’ordre de partir vers la terre d’Israël, le verset dit : « Vous avez, assez longtemps, demeuré dans cette montagne ; demi-tour, partez, rendez vous … au pays des cananéens (…) Allez prendre possession du pays… » (id. I, 6-8). Rachi rapporte le Midrach Agada : « vous avez assez longtemps demeuré » (rav lakhem) littéralement « beaucoup, pour vous ». L’Eternelvous a octroyé trop de récompenses : vous avez reçu la Torah, construit le Tabernacle et ses ustensiles, nommé un Sanhedrin, et des juges de mille, de cent, etc., maintenant : « partez, poursuivez votre route », ne pensez pas rester en retrait du monde, vivre comme au désert ! Bien au contraire, vous aurez à gérer et à pratiquer la Torah partout dans le monde.

Le Rav Chimchon Raphaël Hirch, zatsal, précise que la Torah est la seule religion qui ne provient ni du cœur, ni de l’esprit des hommes, à la recherche d’une quelconque réponse à leur quête spirituelle. Toute religion conçue par l’homme ne reflète jamais que  sa pensée à une époque donnée, dans un lieu particulier, et ne peut que subir des changements au cours du temps, voire disparaitre. La Torah a été donnée à l’homme par D…, afin de lui enseigner quelle doit être sa vision du monde, et comment conduire son existence sur terre, pour réussir sa mission, selon la volonté de son Créateur.

« Gardez-vous de gravir la montagne ; et de toucher à son extrémité : quiconque toucherait à la montagne serait mis à mort » (Chémot XIX, 12). Ce lieu où la Torah a été donnée est un emplacement hors « des normes » de la terre. Pourquoi cette interdiction à gravir la montagne ? Pour signifier que l’endroit est particulier, séparé de ce monde, et que l’homme doit aussi se séparer, pour se préparer, se sanctifier, changer ses habitudes de vie, intérieures et extérieures, afin d’accéder à une nouvelle naissance. S’il n’est pas capable de recevoir la Torah dans son état actuel, sa décision d’œuvrer pour l’accomplir, le rendra apte à l’accueillir. Bien que le Sinaï soit une « petite » montagne, elle reste un lieu élevé, au dessus du niveau des terres où vit l’humanité dans sa grande majorité, elle a été désignée pour le don de la Torah qui nous vient (de l’au-delà), pour être appliquée dans toutes les époques, et en toutes circonstances.

Chabbat Chalom Oumévorakh