Parachat Ki tissa
« Le peuple vit que Moché tardait à descendre de la montagne, le peuple s’attroupa autour d’Aharon, et lui dit : Lève-toi ! Fais-nous des dieux qui marcheront devant nous, car celui- ci Moché, l’homme qui nous a fait monter du pays d’Egypte, nous ne savons pas ce qu’il est devenu. » (Chémot XXXII, 1)
Les commentateurs tentent d’expliquer la conduite des enfants d’Israël. Comment ont-ils pu faire un veau d’or aussi rapidement après le don de la Torah ? Après avoir été témoins de l’intervention de l’Eternel dans ce monde-ci, après avoir vécu tant de miracles, comment pouvaient-ils imaginer qu’un veau en or fabriqué par l’homme soit « celui qui t’a fait monter du pays de l’Egypte » ?
Selon le Ramban, les Bné Israël ne cherchaient pas de dieux étrangers, mais simplement un guide qui remplacerait Moché Rabbénou. C’est ce que le verset exprime lorsqu’ils ont demandé « des dieux qui marchent devant nous », et non pas des dieux qui donnent la vie, tout juste veulent-ils un guide pour leur montrer le chemin du pays d’Israël. C’est pourquoi ils rappellent « celui-ci Moché », c’est-à-dire l’envoyé du Ciel pour leur montrerait la route. On peut alors mieux comprendre le verset qui a suivi : « Aharon vit cela et il érigea un autel et proclama, et dit : c’est fête pour l’Eternel demain ! »(Id. XXXII, 5). Pour l’Eternel, et pas pour le Veau d’or.
Le rav Yérou’ham Lévovitch zatsal, pour expliquer ce Ramban, se réfère à la Beraïta de rabbi Pinhas Ben Yair, laquelle dit : « La Torah mène à la vigilance, la vigilance au zèle(…) jusqu’à la sainteté et la sainteté qui mène à l’esprit prophétique » (Avoda Zara 20b). Pour arriver au haut de l’échelle, il faut d’abord passer par des étapes et gravir petit à petit les échelons, les uns après les autres.
La Mitsva de Tsitsit en est une belle illustration. La Torah exige un fil d’azur sur tout vêtement à quatre coins : « Vous le regarderez et vous vous souviendrez de tous les commandements de l’Eternel. » (Bamidbar XV, 39). C’est que l’azur rappelle le bleu de la mer, la mer rappelle le ciel, et le ciel rappelle le trône Céleste. Pourquoi évoquer d’abord la mer, ensuite le ciel, et ne pas se référer directement à l’Eternel ? La Torah développe les liens par étapes, le bleu d’azur est une image, qui sera une aide au souvenir.
C’est exactement ce que les enfants d’Israël ont cherché dans ce veau en or : une représentation matérielle qui leur rappellerait « le D… d’Israël », sachant que le taureau est représenté au trône Céleste, comme il est dit : « Une face de taureau à gauche » (Yéhézkel I, 10), sur un des quatre pieds. C’était donc la meilleure image terrestre, rappelant en permanence, la majesté divine. Ils ne firent pas de sacrifice au veau, mais à l’Eternel, comme le mentionne le Ramban lui-même.
Malheureusement si les intentions, au départ, se voulaient concevables, nombreux furent ceux qui se livrèrent à l’idolâtrie du veau, lui offrant des sacrifices. Du spirituel initial ils sombrèrent dans la vile matérialité, et dans la débauche.
Aucune représentation matérielle ne peut convenir à l’Eternel, « Il n’a ni corps, ni forme de corps … il est unique et il n’y a pas d’unité comme la sienne ». Il est certain, poursuit le rav Yérou’ham, que notre labeur sera plus difficile, mais il vaut mieux rester à un niveau plus bas dans notre service Divin plutôt que de trébucher dans le danger de l’empirisme matérialiste. Le roi David a dit aussi : « Je fixe constamment l’Eternel devant moi » (Téhilim XVI, 8). Se pénétrer du fait que nous sommes toujours dans la Présence divine nous éviterait toute transgression.
Chabbat Chalom Oumévorakh