Parachat  ‘HAYE  SARAH 

Parachat  ‘HAYE  SARAH 

         « Or Abraham était vieux, avancé dans la vie ; et l’Eternel avait béni Abraham en tout » (Béréchit XXIV, 1). Nos Sages (dans Baba Métsia,87a) nous enseignent que jusqu’à l’époque d’Abraham, les marques de vieillesse n’existaient pas. Et comme Yts’hak ressemblait à Abraham, il arrivait que l’on s’adressait à Yts’hak en croyant s’adresser à Abraham et inversement.

         Le Midrach Rabba (65,9) rapporte qu’Abraham a réclamé la vieillesse : « un homme et son fils qui entrent dans un endroit, les gens ne savent pas lequel ils doivent honorer, si Tu le « couronnais » dans sa vieillesse, alors ils le sauraient ». L’Eternel lui répondit : « tu demandes quelque chose de bien : vieillir, et tu seras le premier ». C’est ce que le verset nous dit :   Or Abraham était vieux.

         A la lecture de ce midrach on pourrait penser que c’est juste par commodité qu’Abraham demanda la vieillesse, simplement pour distinguer le père du fils. Mais un autre midrach (Tan’houma) nous dit, à propos du verset (Téhilim XLV, 3) : « tu es beau entre tous les fils de l’homme », qu’il s’agit d’Abraham. C’est dire que la modification de son apparence extérieure, par les cheveux blancs, et la barbe blanche, est venue révéler la noblesse de son âme. Abraham rechercha la beauté de la vieillesse, en ce qu’elle est une couronne de gloire et un honneur ! Autrement, on aurait du mal à comprendre pourquoi un homme voudrait vieillir !

         Le Rav Chimchon Pinkous zatsal nous donne deux explications, la première, simple, est que l’homme qui s’interroge sur son passé n’est pas toujours satisfait. Il peut penser, qu’en fin de compte, il n’a pas encore fait grand-chose dans sa vie. Le présent est trop court pour réaliser des projets, c’est donc sur le futur qu’il placera son espérance. Un grand avenir peut encore l’attendre et il aurait le temps de réaliser tous ses rêves. Mais lorsqu’un homme avance en âge, il se rend compte qu’il ne lui reste plus vraiment beaucoup de temps pour entreprendre ce qu’il aurait voulu et il regrette de n’être pas plus jeune. La vieillesse n’a donc pas beaucoup de valeur à ses yeux.

         D’après la vision de la Torah, bien au contraire, l’homme ne sait pas ce qu’il pourra faire dans le futur, mais il est assuré de son passé, de ce qu’il a déjà accompli en étude de Torah et dans l’exercice des Mitsvot. Un juif qui vieillit, porte des années de prière et de pratique des mitsvot, les signes extérieurs de la vieillesse sont pour lui un honneur, les « grades » franchis au cours de toutes ces années au service de son Créateur. Le jeune n’a pas encore grand-chose à son compte et il est donc moins digne de considération que le plus âgé. C’est ce que le verset nous dit : « le nombre des années que vécut Abraham fut de cent soixante-quinze ans» (Béréchit XXV, 8).

          Vivre, expliquait le rav Yérouham de Mir ce n’est pas juste respirer, manger ou boire, mais c’est ce qu’un homme accomplit et atteint dans ce monde. Ces cent soixante-quinze ans de vie d’Abraham, étaient riches en actions méritoires et en mitsvot qui justifiaient sa demande, et la couronne de vieillesse qui lui a été octroyée.

         Le rav Pinkous nous donne une deuxième explication, plus subtile. L’essentiel de l’homme n’est pas seulement son passé mais, en fait, surtout le présent. Parce que lorsqu’Abraham prie, à l’âge de cent soixante-dix ans, ce n’est pas simplement la prière d’un homme de cet âge, mais la prière de cent soixante-dix années de prières. Les années de grandeur d’Abraham se retrouvent dans la qualité de sa prière du jour. « Avancé dans la vie », se traduit littéralement « il vient avec ses jours », des jours bien remplis, comme un grand édifice qu’il aurait construit, et au-dessus duquel il rajoute, davantage encore, chaque jour. C’est donc la qualité et l’intensité de son travail, au jour le jour, présent, qu’Abraham demande à mettre en relief en sollicitant de D… les signes de la vieillesse. Et c’est à cette beauté que fait allusion le verset « tu es beau entre tous les fils de l’homme », Abraham.

Chabbat Chalom Oumévorakh